Zones à Trafic Limité : retour sur la visite de centres-villes en Italie

Découvrir comment les villes italiennes se débarrassent progressivement des voitures dans leurs centres-villes : voilà quel était objectif de la visite de terrain organisée fin avril par les associations Rue de l’Avenir France et Suisse et par l’association italienne LAQUP. La formation portait notamment sur les ZTL, Zones à Trafic Limité, mises en place de longue date dans de très nombreuses villes italiennes.

L’AUPA a participé à ces 3 journées de visite sur 3 communes du nord de l’Italie : Cuneo, Milan et Turin. Chaque commune a mis en place des restrictions différentes d’accès à son centre : interdiction d’y entrer en heure de pointe du matin, accès autorisé mais payant, restriction nocturne pour lutter contre les nuisances sonores et l’insécurité… Des dispositifs qui s’avèrent efficaces pour réduire le trafic automobile, relativement faciles à mettre en place et surtout très rentables pour les communes.

L’artère principale de Cuneo, ville de 55 000 habitants, a été piétonnisée en 2012 sur un linéaire de 700 mètres. Initialement, la commune portait simplement un projet de requalification de la Via Roma : réaménagement de l’espace public, enfouissement des réseaux et réhabilitation des façades. Les élus voulaient un aménagement qui permette une évolution facile du partage de la voirie dans le temps. Les travaux ont duré une année durant laquelle la rue a été fermée à la circulation automobile. Une fois les travaux achevés, la Via Roma n’a jamais été réouverte à la circulation et l’acceptation par les habitants et les commerçants a été totale du fait qu’ils avaient pris de nouvelles habitudes de déplacement.

La Via Roma réaménagée, favorable à la déambulation piétonne et permettant si nécessaire la circulation automobile à vitesse réduite.

La Via Roma réaménagée, favorable à la déambulation piétonne et permettant si nécessaire la circulation automobile à vitesse réduite.
© Amandine Martin-Laval

La Ville de Turin, 850 000 habitants, a opté pour un accès à son centre-ville restreint de 7h30 à 10h30 du lundi au vendredi. L’intérêt ? que les actifs accèdent au centre-ville en transport collectif sans avoir une levée de bouclier des commerces qui ouvrent en fin de matinée. Ce dispositif a permis de réduire les espaces de stationnement et ainsi de dédier plus d’espaces aux piétons et aux vélos. Places et aires piétonnes se sont multipliées dans le centre, les abords des écoles ont été pacifiés, des rues à priorité cyclable ont été créées… Là aussi, la mise en place de la ZTL en 1994 a été un succès et elle a été étendue en 2010 pour atteindre 260 hectares.

Rue en Italie, avec circulation modérée

Grâce à la ZTL, les espaces de stationnement en centre-ville ont été réduits et les places ont pu être réaménagées en faveur des piétons.
© Amandine Martin-Laval

A Milan, 1,4 million d’habitants, l’accès au centre-ville en voiture est payant et réservé aux véhicules les moins polluants. Là encore, la réduction du trafic liée à la ZTL permet d’offrir plus d’espaces aux modes actifs. Sont notamment apparus au début de la crise sanitaire, plusieurs projets d’urbanisme tactique[1]. Peu coûteux, rapidement mis en œuvre et conçus avec les habitants, ces projets d’aménagement permettent aux piétons de se réapproprier l’espace public et de faire évoluer les pratiques automobiles. Le caractère temporaire de ces aménagements offre un « droit à l’erreur » à la collectivité : l’aménagement permet de tester les pratiques et peut être réajusté par la suite pour concilier au mieux les pratiques piétonnes, cyclables et automobiles.

[1] L’urbanisme tactique, également appelé hacking urbain, repose sur trois principes : l’intervention à petite échelle, le court terme et le low-cost. Il peut s’agir de parking days, journées durant lesquelles des places de parkings sont transformées en espaces conviviaux et végétalisés, ou de guerilla gardening qui consiste à planter des végétaux partout dans la ville, même dans les endroits les plus insolites. Ces actions encouragent la mobilisation et l’implication des habitants, leur permettent de se réapproprier la ville et d’être force de proposition pour leur quartier et, in fine, développent les liens sociaux.

photo d’aménagement du programme Piazze aperte – « Places ouvertes » - à Milan

Exemple d’aménagement du programme Piazze aperte – « Places ouvertes » – à Milan : la place de la voiture a été réduite sur cette intersection qui devient, à l’école de la sortie d’école, un lieu très fréquenté par les enfants et leurs familles.
© Amandine Martin-Laval

Durant chaque visite, élus et techniciens nous ont expliqués les dispositifs qu’ils avaient mis en place. Sur les 3 communes, des constats similaires étaient faits.

Premier constat. Lors de la mise en place de la ZTL, les élus étaient systématiquement confrontés aux refus des commerçants et à la réticence des habitants. Mais finalement, tout le monde y gagne : les habitants qui voient leur qualité de vie améliorée (moins de nuisances sonores et de pollutions) et les commerçants qui bénéficient d’une fréquentation plus importante grâce à la déambulation piétonne.

Second constat. L’investissement consiste à la pose de « portes électroniques » qui contrôlent automatiquement si les véhicules entrants sont autorisés ou pas. Au dire des personnes rencontrées, ce coût initial est très largement rentabilisé par les recettes liées à la ZTL (paiement du droit d’entrée et/ou verbalisation des véhicules non autorisés).

L’attachement à la voiture individuelle est important dans la plaine du Pô, haut lieu de l’industrie automobile italienne. Mais la prise de conscience des enjeux de santé publique liés à la pollution de l’air y est également forte. Les Italiens ont aujourd’hui une longueur d’avance sur les Français en termes de pacification des centres-villes. Comme chez nous, leur climat agréable et les qualités patrimoniales remarquables des centres-villes sont de puissants moteurs pour rendre la marche à pied plaisante. Le mode de vie du nord italien est très proche du nôtre, à nous de tirer partie de leurs expériences pour nous aussi gagner en qualité de vie dans les centres-villes.

Dernières publications

Le Mansard C – 4e Etage
1 Place Martin Luther King
Avenue du 8 mai 1945
13090 Aix-en-Provence

04 42 23 12 17
aupa@aupa.fr

Agence d'urbanisme du Pays d'Aix Durance logo blanc